Mort d’Elizabeth II : Histoire d’un monarque controversé
Mort d’Elizabeth II. Le monarque, qui avait accédé au trône en 1952 à l’âge de 26 ans, est morte le 8 septembre à 96 ans… Un monarque très controversé. Souveraine impassible, vénérée par le peuple britannique, cheffe des armées, gouverneure suprême de l’Eglise anglicane, interlocutrice de quinze premiers ministres britanniques, elle laisse une empreinte durable sur la monarchie. La question a répondre maintenant est : Qui sera le prochain roi d’angleterre ? Le nouveau souverain de l’angleterre est Charles qui sera couronné sur le nom de Charles III en remplaçant de la reine Elizabeth II morte.
C’était en 1991 à Harare, capitale du Zimbabwe, à l’issue d’un sommet du Commonwealth. Quand Elizabeth II a fait son apparition sous la marquise dressée sur la pelouse du Haut-Commissariat britannique, l’invité s’est figé. La souveraine est plus petite qu’on ne l’imagine. Sa poignée de main est molle. Sa voix nasillarde, ses fins de phrase pratiquement inaudibles. Cette femme qui dégage une autorité naturelle toise son interlocuteur d’un sourire à peine esquissé. Le dialogue se limite à deux questions banales. Un court silence s’installe. La reine disparaît. La monarque excelle dans cette double nécessité de paraître à la fois accessible et inaccessible. C’est une vraie reine, comme l’avait déclaré, admiratif, le président Mitterrand.
On avait toujours l’impression d’avoir vu Elizabeth II, morte le 8 septembre, à l’âge de 96 ans, dans un musée de cire, comme chez Madame Tussauds à Londres. C’est que cette page vivante d’histoire avait été l’interlocutrice de quinze premiers ministres britanniques, de quatorze présidents américains, de l’ensemble des chefs d’Etat de la Ve République. N’avait-elle pas eu pour interlocuteurs toutes les personnalités politiques de la planète, de Churchill à de Gaulle en passant par Kennedy et par Nehru ?
C’était en même temps un symbole. Sous son règne, le Royaume-Uni avait connu toutes les joies du succès et les affres de la défaite, démontrant ainsi qu’une nation prise entre un équilibre ancien déjà rompu et un équilibre nouveau qui reste à inventer peut, à travers la monarchie, se refaire.
Elizabeth II, Courtoise et imperturbable
Monarque la plus photographiée et peinte du globe, Elizabeth II était, de surcroît, un ordinateur vivant. Si elle n’avait pas été reine, murée dans son silence et dans une dignité qui siéent non seulement à un chef d’Etat et d’un Empire, aujourd’hui devenu Commonwealth, mais encore au chef des armées et au gouverneur suprême de l’Eglise anglicane, quelle mémorialiste elle aurait pu être ! On peut toutefois se demander si secrètement cette femme petite, timide, à l’éducation sommaire, n’a pas détesté cette charge sa vie durant.
Peu embarrassée de préoccupations littéraires ou artistiques, Elizabeth II était le prototype même de cette « gentry terrienne » anglaise toute dévouée au culte des animaux. En dehors de ses visites officielles, elle était toujours entourée de ses chers corgis assurés d’un soin particulier. Personne n’avait jamais rien pu lire sur ce visage lourd de secrets qu’elle emporte dans sa tombe.
C’était toujours la même impassibilité dans les situations les plus dramatiques, la même maîtrise devant des événements éprouvants. L’image la montrant seule, sur une stalle de la chapelle du château de Windsor, toute vêtue de noir face au cercueil de son époux le prince Philip, lors des obsèques de ce dernier, le 17 avril 2021, résume son stoïcisme. Courtoise, imperturbable, elle n’avait jamais sourcillé face aux attaques cruelles de la presse tabloïde contre sa famille, en particulier lors de la crise provoquée par la mort de la princesse Diana, dans un accident de la circulation, à Paris, le 31 août 1997. La reine, probablement affectée par la rupture, en 2020, de son petit-fils Harry et de son épouse Meghan Markle avec les Windsor et par les accusations de racisme qu’ils ont portés contre la famille royale – accusations qui épargnaient la souveraine – n’en a rien laissé paraître, tentant seulement, par un communiqué, d’apaiser les tensions. Elle n’a rien exprimé lorsque son fils Andrew a été accusé d’agression sexuelle sur une mineure, mais lui a retiré, en janvier 2022, ses titres militaires et ses parrainages d’associations. Même à ses rares amis, Elizabeth II ne se livrait guère.
Lorsqu’elle naît à Londres, dans l’élégant quartier de Mayfair, le 21 avril 1926, rien ne prédestine Elizabeth Mary Windsor au trône. Elle est le premier enfant du duc et de la duchesse d’York. Le duc est le second fils du roi George V, auquel a succédé tout naturellement, le 20 janvier 1936, le prince de Galles, Edward. Nièce du futur roi, elle est promise à devenir un membre mineur de la famille royale.
Elizabeth II, Le cheval et la passion de sa vie
Son enfance est idyllique. Mais le 10 décembre 1936, à la suite de l’abdication de son oncle, Edward VIII, son père monte sur le trône sous le nom de George VI. Devenue princesse héritière à 10 ans, Elizabeth se retrouve avec ses parents et sa jeune sœur, Margaret, propulsée, du jour au lendemain, sous les projecteurs de l’actualité.
Très vite, elle fait l’apprentissage des charges qui seront les siennes. Tandis que Margaret se distingue par sa fantaisie, Elizabeth se caractérise par son sérieux et son application. Sa gouvernante, la vicomtesse Marie-Antoinette de Bellaigue, lui enseigne le français. La princesse, alors âgée de 13 ans, prononce son premier discours officiel dans notre langue à l’occasion de la visite d’Etat à Londres du président Lebrun en 1939.
Elizabeth n’a jamais fréquenté aucune école. Des tuteurs privés l’initient également à l’allemand, langue dans laquelle elle a rapidement pu tenir une conversation, mais aussi à l’histoire et aux rudiments des affaires de l’Etat. La princesse apprend à monter à cheval, sport qui restera sa grande passion, de même que les courses et son écurie à ses couleurs. La vie de famille est calme, équilibrée, un peu guindée sous l’effet d’un protocole rigoureux.
Père adoré, George VI est un homme timide, foncièrement bienveillant, mais frappé d’un terrible bégaiement. De plus, il est tourmenté par une charge qu’il n’a ni cherchée ni souhaitée. Lors du déclenchement de la seconde guerre mondiale, en septembre 1939, le roi veut envoyer son épouse et ses deux filles au Canada, comme le suggère Winston Churchill, le premier ministre du Royaume-Uni.
Face au refus de la reine de le quitter, les princesses restent au château de Windsor, en dehors de Londres, plutôt qu’à Buckingham Palace, jugé trop vulnérable. Pour remonter le moral de la nation, « Lilibet », son surnom, princesse héritière, multiplie les apparitions publiques, en uniforme de grenadier de la garde ou en ambulancière alors qu’elle apprend à conduire au camp militaire d’Aldershot. Fin 1944, munie de son permis, Elizabeth, matricule 230873, rejoint l’armée de réserve, comme conductrice de camion. A plusieurs reprises, elle s’adresse à la radio à ses futurs sujets.
Elizabeth II, Reine à 26 ans
La paix revenue, Elizabeth accompagne ses parents dans leurs voyages, en province comme dans le Commonwealth, et prononce ses premiers discours. Son mariage, le 20 novembre 1947, avec un cousin éloigné, Philip Mountbatten, membre de la famille royale grecque et ancien écuyer du roi, est l’un des premiers reportages télévisés retransmis à travers l’Europe occidentale. De ce mariage d’amour apportant bonheur et équilibre nécessaires à l’exécution des tâches de souveraine naîtront quatre enfants : Charles (1948), Anne (1950), Andrew (1960) et Edward (1964). Ils donneront à Elizabeth et à Philip huit petits-enfants. Mais la santé de son père, atteint d’un cancer, épuisé par la lourdeur de la Couronne, chancelle.
En ce début 1952, aux côtés de Philip, la princesse effectue une visite officielle au Kenya, première étape d’une tournée qui doit l’emmener dans le sous-continent indien et en Australie. Le 6 février, le roi George VI meurt pendant son sommeil au château de Sandringham. Sa fille aînée, alors âgée de 26 ans, lui succède.
A l’aéroport d’Heathrow, le 7 février, les hommes politiques alignés derrière le chef du gouvernement, Winston Churchill, en pardessus noir, accueillent une fine et frêle silhouette qui descendait de la passerelle de l’avion en provenance d’Entebbe. Dans l’enveloppe contenant le document d’accession, le grand chambellan doit écrire le nom choisi par la nouvelle monarque. Elle aurait pu choisir Mary III plutôt que de risquer une éventuelle confusion avec sa mère, la reine Elizabeth. Elle opte en faveur de son premier prénom.
Le 8 février 1952, à 11 h 15, Elizabeth II est proclamée reine de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, cheffe du Commonwealth, gouverneure suprême de l’Eglise d’Angleterre et commandante en chef des forces armées britanniques.
Elizabeth II Une nouvelle ère « élizabéthaine »
« Dieu m’aide à remplir dignement cette lourde tâche qui m’échoit si tôt dans ma vie », déclare le 40e souverain britannique à régner depuis Guillaume le Conquérant d’une voix un tantinet stridente mais assurée. Une photo mémorable montre les trois reines réunies – Elizabeth, sa mère et sa grand-mère Mary – autour du catafalque à Westminster Hall, portant de longs voiles noirs.
Avec ce cliché, le pays se sent immortel. La jeune reine est un nouveau maillon de la chaîne nationale à travers les âges, d’Egbert de Wessex aux Saxe-Cobourg-Gotha rebaptisés Windsor. Seize mois plus tard, elle est couronnée dans l’abbaye de Westminster, une cérémonie qui sera l’une des premières fêtes cathodiques depuis l’avènement de la télévision.
Winston Churchill évoque alors le début d’une nouvelle ère « élizabéthaine », en souvenir d’Elizabeth Ire (1558-1603), qui avait hérité d’un royaume désuni et faible et avait légué une nation riche et redoutée. Au début de son règne, la force d’Albion pouvait encore faire illusion.
Cette année-là, la Grande-Bretagne accédait au rang de puissance nucléaire. Mais le pays était épuisé économiquement par la victoire sur le nazisme chèrement acquise, la livre tombait, le produit intérieur brut chutait, les conflits sociaux se multipliaient, l’Empire craquait de toutes parts sous les effets de la décolonisation.
Elle s’appuie sur les mêmes piliers que la reine Victoria : le palais, l’armée, la religion et la noblesse
Dans les années qui suivent son couronnement, cette jeune femme apparemment effacée jouit d’un prestige personnel auquel personne ne s’attendait. Aucun doute, pour tenir la fonction, la reine possède un trait de caractère indispensable, que les uns appellent détermination, les autres autorité. Si elle n’a de la reine Victoria (1837-1901), sa trisaïeule montée sur le trône à l’âge de 17 ans, ni l’ironie cinglante ni le sévère chignon, le profil est le même, celui du contrôle de soi empreint de froideur.
Avec une habileté redoutable, elle contrecarre les manœuvres de son oncle, Lord Mountbatten, visant à restaurer la lignée éponyme remplacée par Windsor en 1917 en raison des sentiments anti-germaniques nourris par la population lors de la première guerre mondiale. Elle refuse ensuite le titre de consort à Philip et marginalise sa mère, dont l’influence demeurait grande au sein de la vieille garde du palais.
En 1955, elle oppose son veto au projet de mariage de sa sœur, Margaret, et du « group captain » Peter Townsend, directeur adjoint de la maison royale. De vingt ans son aîné, il est de surcroît divorcé, ce qui le rend inacceptable aux yeux de l’Eglise d’Angleterre. Peu à peu, les courtisans nommés sous le règne précédent sont écartés au profit de personnalités moins conservatrices, bien que sorties du même moule, rejetons de grandes familles et soldats de carrière. Elle s’appuie alors sur les mêmes piliers que la reine Victoria : le palais, l’armée, la religion et la noblesse.
Elizabeth II, Le glamour de Lady Diana
En 1981, elle donne son aval à l’union entre son fils aîné et Lady Diana, qui apporte à la monarchie britannique le glamour qui lui manquait. Mais quand les scandales entourant le couple princier menacent de déstabiliser la dynastie, la reine s’oppose vivement à son ex-bru, après son divorce en 1996. La souveraine était une femme traditionnelle. Longtemps, les divorcés avaient été bannis de sa cour, comble d’hypocrisie à la lumière des frasques matrimoniales de sa sœur et de trois de ses enfants.
Le recrutement des membres de la maison royale était entaché de sexisme. La reine, en fait, préférait travailler avec les hommes. Colonelle en chef de centaines de régiments, la reine était étroitement associée aux forces armées, avec lesquelles elle partageait le sens de la hiérarchie, mais elle n’a jamais eu d’écuyère. Il faudra attendre les années 1990 et une campagne du prince Charles pour que des Antillais puissent intégrer les régiments des grenadiers de sa garde.
Sur le plan politique, la reine a toujours scrupuleusement veillé à ne pas s’ingérer dans les affaires du gouvernement en faisant connaître sa position. Personne n’a jamais su ce qu’elle pensait du Brexit. Pas question pour la monarque de mélanger ses convictions personnelles avec les devoirs de sa charge. Elle n’avait d’ailleurs jamais donné d’interviews aux médias. La tonalité de son message de Noël, le seul discours qu’elle rédige sans contreseing ministériel, était toujours consensuelle. Rien n’a jamais transpiré de la teneur de l’audience privée hebdomadaire entre la cheffe de l’Etat et les locataires du 10 Downing Street.
Mort d’Elizabeth II, L’incarnation du sacré
Selon la formule officielle, la reine est autorisée à « formuler des avertissements, donner des encouragements et des conseils ». Le souverain incarne le sacré sans détenir les leviers du pouvoir, assurant à la démocratie un équilibre inégalé. S’il dispose des dossiers les plus secrets dans ses fameuses boîtes rouges et d’un « conseil privé » composé des plus hautes personnalités du royaume, le chef de l’Etat joue en pratique un rôle de notaire contresignant des décisions prises par d’autres. Par exemple, le « discours du trône » qu’elle prononce chaque année est rédigé par son gouvernement.
Reste que malgré ces limites à son action, Elizabeth II n’avait vraiment rien d’un chef d’Etat potiche. La reine doit d’abord nommer le premier ministre. Le système électoral uninominal à un tour lui facilite, certes, cette tâche en dégageant une majorité à la Chambre des communes. Confrontée en 1974 à une assemblée introuvable, elle avait choisi le travailliste Harold Wilson, son premier ministre préféré, qui à ses yeux était mieux à même de former une équipe ministérielle soutenue par les libéraux que le conservateur Edward Heath. Même Margaret Thatcher, qui n’en faisait qu’à sa tête, avait reconnu l’intérêt de pouvoir s’entretenir avec une personnalité au courant des affaires du royaume mais au-dessus de la mêlée politique.
Mort d’Elizabeth II, Une sensibilité centriste
Des témoignages de dignitaires, britanniques et étrangers, se dessinait le profil d’une monarque peu intéressée par les joutes parlementaires de Westminster. Elizabeth II était partisane d’une droite modérée. Son antipathie pour l’autoritaire Margaret Thatcher, les rumeurs faisant état de ses inquiétudes devant la dégradation du tissu social sous les tories, entre 1979 et 1997 et les risques d’éclatement du Commonwealth provoqués par le problème des sanctions contre l’Afrique du Sud de l’apartheid indiquent une sensibilité centriste. D’où sa bonne entente avec ses premiers ministres conservateurs de la vieille école, en particulier son mentor, Winston Churchill, les grands bourgeois Harold Macmillan et Anthony Eden ou l’aristocrate Lord Home.
Ses relations avec les chefs de gouvernement de droite issus de milieux populaires, comme Edward Heath, Margaret Thatcher ou John Major, avaient été plus difficiles dans la mesure où leur activisme, que ce soit en matière de privatisations ou au sujet de l’Europe, avait mis à mal l’unité du pays. Comme il n’y a pas plus monarchiste qu’un dirigeant travailliste, ses rapports avec Harold Wilson, James Callaghan et Tony Blair avaient été marqués d’une grande cordialité.
En général, les interventions personnelles de cette anglicane très croyante s’étaient limitées aux nominations des évêques du palais. Pour faire connaître publiquement son point de vue, la souveraine, toutefois, n’avait pas hésité à faire appel aux autres membres de la famille royale (le duc d’Edimbourg ou le prince Charles), qui ne s’étaient jamais privés de critiquer ouvertement la politique gouvernementale.
Mort d’Elizabeth II, Une démarche fédératrice
Sa deuxième réussite avait été de fédérer les divers peuples du royaume. Le chef de l’Etat est garant de l’unité de la nation face à la multiplication des forces centrifuges aux marches du pays, en particulier en Ecosse.
Enfin, malgré l’adhésion, en 1973, du Royaume-Uni au Marché commun devenu Union européenne, la reine était parvenue à maintenir le lien avec le Commonwealth, la grande famille d’outre-mer vis-à-vis de laquelle elle avait une affection toute particulière. Son autorité morale à la tête de cette association regroupant les anciennes colonies lui avait permis de désamorcer trois crises constitutionnelles : l’Australie (1975), la Grenade (1983) et Fidji (1987).
La reine connaissait personnellement tous les chefs d’Etat du Commonwealth et de bon nombre d’autres pays. Elle avait été le premier souverain britannique à mettre les pieds en Russie (1994) et en Chine (1986). En mai 2011, la souveraine avait effectué l’un de ses plus délicats voyages officiels, une visite d’Etat en République d’Irlande qui fut un triomphe, malgré les blessures des deux côtés d’une guerre civile de trente ans dans l’Ulster toujours sous l’égide de la Couronne d’Angleterre.
Cédant aux pressions de son mari d’abord, du prince Charles ensuite, Elizabeth II avait accepté petit à petit de donner à l’opinion une image moins solennelle de la monarchie
Enfin, la monarque se considérait comme la cheffe de la « firme royale », comme avait baptisée son père la Royal House of Windsor. A elle, les grandes affaires du royaume, aux autres un créneau particulier : l’écologie et les minorités raciales (Charles), le sport (Philip), la santé (Anne), le commerce extérieur (Andrew)…
Cédant aux pressions de son mari d’abord, du prince Charles ensuite, Elizabeth II avait accepté petit à petit de donner à l’opinion une image moins solennelle de la monarchie. Le fameux reportage de la BBC, diffusé en 1969, montrant la reine et sa famille en train de faire cuire des saucisses lors d’un pique-nique en Ecosse avait ouvert la voie de la médiatisation.
Après l’annus horribilis de 1992, lorsque Charles et Andrew avaient vu leurs couples respectifs exploser et que son château de Windsor, sa résidence favorite, avait été la proie des flammes, elle avait multiplié les gestes de communication avec ses sujets en sortant des sentiers battus et rebattus du protocole : visite à un pub, à un McDonald’s, à une HLM, gel de la liste royale pendant une décennie, utilisation d’avions charters pour les déplacements, vente du yacht Britannia. La plupart des vieilles barrières avaient été abattues.
Mort d’Elizabeth II, Toujours réservée, souvent distante
Elizabeth II n’était toutefois pas du genre à convier à sa table des éboueurs, ni même à faire ses courses à bicyclette. D’ailleurs, peu de Britanniques souhaitent une telle popularisation d’une institution de nature à traverser les siècles, donc immuable. Comme disait l’essayiste Walter Bagehot (1826-1877), « on peut avoir une cour splendide ou pas de cour du tout, mais rien ne saurait justifier une cour médiocre ».
Il aura fallu attendre le désarmement, en décembre 1997, du yacht « Britannia » pour la voir verser quelques larmes en public
Destinée très jeune à monter sur le trône, Elizabeth était toujours réservée, souvent distante. Il aura fallu attendre le désarmement, en décembre 1997, du yacht Britannia pour la voir verser quelques larmes en public. Deux mois plus tôt, à la mort de Diana, elle avait été incapable de manifester la moindre émotion alors que le pays était en pleurs. Certains, à gauche, critiquaient le coût de la monarchie, mettant en cause ses châteaux, ses écuries ou sa fortune personnelle. Sa personnalité passéiste vénérant les usages établis et se méfiant du changement était contestée dans les milieux républicains, toutefois minoritaires. Les coutumes désuètes de la cour étaient souvent critiquées par les chroniqueurs royaux.
Si elle avait toujours cultivé les bonnes vieilles valeurs traditionnelles de sa caste et était très attachée aux fastes de la royauté, Elizabeth II avait multiplié les concessions à l’époque moderne. L’allégement du protocole lors du mariage, le 29 avril 2011, de son petit-fils, le prince William, avec une roturière, Catherine Middleton, sa présence au concert rock de Buckingham Palace lors de son jubilé de diamant en juin 2012 et son intervention dans un court-métrage au côté de Daniel Craig, l’interprète de James Bond, diffusé à l’occasion de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, le 28 juillet 2012, témoignaient de sa formidable capacité d’adaptation.
Personne n’avait jamais mis en doute le sens du devoir, la bonne volonté et le professionnalisme d’Elizabeth II. Par sa dignité tranquille, son dévouement total à sa fonction et l’intelligence de son rôle, cette souveraine, aristocrate de naissance mais petite bourgeoise par ses goûts, avait réussi à ancrer plus solidement que jamais l’une des institutions les plus anachroniques au monde : la monarchie britannique.
Mort d’Elizabeth II, Elizabeth II en plusieurs dates
- 21 avril 1926 Naissance à Londres
- 10 décembre 1936 Abdication de son oncle Edward VIII. Le père d’Elizabeth, George VI, monte sur le trône
- 20 novembre 1947 Epouse Philip Mountbatten
- 14 novembre 1948 Naissance de Charles, prince héritier
- 15 août 1950 Naissance d’Anne, princesse royale
- 6 février 1952 Mort du roi George VI
- 8 février 1952 Elizabeth II est proclamée reine de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, cheffe du Commonwealth, gouverneure suprême de l’Eglise d’Angleterre et commandante en chef des forces armées britanniques
- 2 juin 1953 Cérémonie du couronnement dans l’abbaye de Westminster
- Avril 1957 Première visite officielle en France
- 19 février 1960 Naissance d’Andrew, duc d’York
- Novembre 1963 Les Beatles donnent un concert devant la famille royale. La reine leur remettra l’ordre de l’Empire britannique en octobre 1965
- 10 mars 1964 Naissance d’Edward, comte de Wessex
- 24 janvier 1965 Mort de Winston Churchill, premier premier ministre de la reine
- 1977 Vingt-cinq ans de règne (Jubilé d’argent)
- 29 juillet 1981 Le prince Charles épouse Lady Diana Spencer
- 21 juin 1982 Naissance du prince héritier William, fils de Charles et Diana
- 1992 La reine qualifie cette année d’ « annus horribilis » après les divorces de deux de ses enfants (Andrew et Anne) et l’incendie d’une partie du château de Windsor
- Décembre 1992 Séparation du prince Charles et de Lady Diana
- Mai 1994 Inauguration du tunnel sous la Manche en compagnie de François Mitterrand
- 1996 Divorce du prince Charles et de Lady Diana
- 31 août 1997 Mort de Lady Diana dans un accident de la circulation à Paris
- 5 septembre 1997 Allocution télévisée de la reine où elle exprime son admiration pour Diana
- 2002 Cinquante ans de règne (Jubilé d’or)
- 9 février 2002 Mort de Margaret, sœur de la reine
- 30 mars 2002 Mort d’Elizabeth, mère de la reine
- 29 avril 2011 Mariage du prince William, duc de Cambridge, petit-fils de la reine, et de Catherine Middleton
- Mai 2011 Première visite en Irlande depuis son indépendance en 1922
- 2012 Soixante ans de règne (Jubilé de diamant)
- 27 juillet 2012 La reine inaugure les Jeux olympiques de Londres
- 13 juillet 2016 Nomination de Theresa May, treizième premier ministre de la reine
- 19 mai 2018 Mariage du prince Harry, duc de Sussex, petit-fils de la reine, et de Meghan Markle
- 24 juillet 2019 Nomination de Boris Johnson, quatorzième premier ministre de la reine
- 9 avril 2021 Mort du prince Philip, duc d’Edimbourg, époux de la reine
- 8 septembre 2022 Mort à 96 ans.
Mort d’Elizabeth II, L’archevêque de Canterbury dit joindre ses « prières au roi et à la famille royale »
L’archevêque de Canterbury, chef spirituel de l’Eglise anglicane, a affirmé jeudi dans un communiqué joindre ses « prières au roi et à la famille royale » après la mort d’Elizabeth II. « Nous avons perdu la personne dont la loyauté inébranlable, le service et l’humilité nous ont aidés à donner un sens à ce que nous sommes au cours de décennies de changements extraordinaires dans notre monde, notre nation et notre société », a dit l’archevêque.
Mort d’Elizabeth II, Le Royaume-Uni est « dévasté » par la mort de la reine, affirme la nouvelle première ministre britannique, Liz Truss
La première ministre britannique, Liz Truss, a déclaré que le Royaume-Uni est « dévasté » par la mort de la reine, le « rocher » sur lequel la Grande-Bretagne moderne a été construite.
Mort d’Elizabeth II, a représenté une « partie importante de l’histoire » du Canada, dit Justin Trudeau
La reine Elizabeth II était une « présence constante » dans la vie des Canadiens et « restera à jamais une partie importante de l’histoire de notre pays », a déclaré jeudi le premier ministre canadien Justin Trudeau.
« Les Canadiens se souviendront et chériront toujours la sagesse, la compassion et la chaleur de Sa Majesté », a ajouté le chef du gouvernement peu de temps après l’annonce du décès de celle qui était la cheffe d’Etat du Canada.
« La mort de ma mère tant aimée est pour moi un grand moment de chagrin », dit le roi Charles
Dans un communiqué publié jeudi après la mort de la monarque de 96 ans dans son domaine du château de Balmoral en Ecosse, Charles a déclaré : « Nous pleurons profondément le décès d’une souveraine chérie et d’une mère très aimée. Je sais que sa perte sera profondément ressentie dans tout le pays, les royaumes et le Commonwealth, et par d’innombrables personnes à travers le monde. »
Charles, devenu roi à la mort de sa mère, a déclaré : « Pendant cette période de deuil et de changement, ma famille et moi serons réconfortés et soutenus par notre connaissance du respect et de la profonde affection dans lesquels la reine était si largement tenue. »
Mort d’Elizabeth II « Nos pensées vont à la famille » et « au peuple du Royaume-Uni », dit la porte-parole de la Maison Blanche
La porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, arrivait au terme de son point presse quotidien, à la mi-journée, lorsque la nouvelle du décès de la reine a été confirmée, parvenant sur tous les téléphones des journalistes. Son débit s’est ralenti, comme si elle semblait un peu prise de court, au milieu d’une explication sur l’inflation. « Notre cœur et nos pensées vont à la famille royale, au peuple du Royaume Uni. Je ne veux pas devancer ce que le président va dire », a-t-elle dit, dans l’attente d’une déclaration du président américain, Joe Biden. Karine Jean-Pierre a rappelé que le Royaume Uni était « l’un des alliés les plus proches » des Etats-Unis.
Mort d’Elizabeth II, Le président irlandais, Michael D. Higgins, salue « une amie remarquable de l’Irlande »
Le président irlandais, Michael D. Higgins, a exprimé ses condoléances après l’annonce de la mort d’Elizabeth II, saluant « une amie remarquable de l’Irlande », a indiqué la présidence dans un communiqué.
« Au moment où nous offrons nos condoléances à tous nos voisins au Royaume-Uni, à la suite de la mort d’une remarquable amie de l’Irlande, nous nous rappelons le rôle joué par la reine Elizabeth dans la longue amitié » entre les deux pays à l’histoire tourmentée, a affirmé le président.
Le chef de l’ONU salue « la grâce, la dignité et le dévouement » d’Elizabeth II
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a salué « la grâce, la dignité et le dévouement » d’Elizabeth II, qui a été une « présence rassurante pendant des décennies de changements de grande ampleur ».
La reine « était largement admirée pour sa grâce, sa dignité et son dévouement à travers le monde. Elle a été une présence rassurante pendant des décennies de changements de grande ampleur, dont la décolonisation en Afrique et en Asie », a-t-il déclaré dans un communiqué.
Charles, le fils aîné d’Elizabeth II, devient automatiquement roi
Au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord – et dans les quatorze autres monarchies du Commonwealth –, la règle pour la succession est celle de la « primogéniture », c’est-à-dire que l’enfant le plus âgé du ou de la monarque accède au trône. En l’occurrence, c’est donc Charles, 73 ans, fils aîné d’Elizabeth II, qui devient roi à la suite de sa mère, quand bien même la cérémonie protocolaire de couronnement a lieu plus tard – peut-être demain.
Mort d’Elizabeth II Emmanuel Macron rend hommage à la souveraine
Le chef de l’Etat français, Emmanuel Macron, a rendu hommage jeudi soir à la reine Elizabeth II et salué « une amie de la France ».
« Sa Majesté la reine Elizabeth II a incarné la continuité et l’unité de la nation britannique plus de soixante-dix ans durant. Je garde le souvenir d’une amie de la France, une reine de cœur qui a marqué à jamais son pays et son siècle », a dit le président sur Twitter.